samedi 2 janvier 2010

Que se passera-t-il si le salarié la refuse la dictature des indicateurs chiffrés de la gestion par objectifs liée au télétravail?

Les risques d’exclusions induites par le forcing au développement du télétravail (suite)

Télétravail salarié à domicile = une vision nouvelle du contrat salarial

Le contrat de travail salarié français est un contrat « au temps » et non « à la tâche ». Le salarié n’est ni un « esclave », dont le temps de travail est illimité, ni un tâcheron rémunéré à la tâche (voir le livre que j’ai écrit avec Pierre Mathevon, médecin du travail « Qualité de vie et santé au travail » - présentation sur http://qualite.vie.travail.free.fr/).

C’est le fruit des luttes ouvrières des XIX e et XX e siècles : le salarié « vend » une partie de son temps contre son salaire. Ce temps de travail doit être mesuré car il est limité et le salarié n’est pas « corvéable » à loisir, depuis la loi du 22 mars 1841 qui est la première loi réglementant la durée du travail d’un salarié. Certes, le salarié a une obligation de moyens (travailler pendant le temps contractuel) et de subordination (suivre les instructions de l’employeur) mais pas d’obligations de résultats, contrairement au travailleur indépendant ou à la profession libérale qui a une obligation de résultats, mais n’est pas « subordonné » à son client.

Il est évident que le contrôle du temps de télétravail est presque impossible, sauf cas très particuliers (télémarketing, centre d’appels, ...). Un contrôle trop pointilleux serait d’ailleurs rejeté par beaucoup de télétravailleurs. C’est pourquoi on constate que la plupart des télétravailleurs sont au « forfait jours » : le contrat prévoit un nombre de jours (par exemple 215 jours de travail par an) et non un nombre d’heures (par exemple 35 heures par semaine).
On constate aussi que le contrôle du temps de travail est remplacé presque toujours par un contrôle de l’activité avec les outils de la « gestion par objectifs ».

Télétravail salarié à domicile = accepter la gestion par objectifs

Il faut être conscients que les télétravailleurs qui restent télétravailleurs sont ceux qui acceptent la gestion par objectif et cette ambigüité dans leur contrat de travail : de fait le télétravailleur est proche du travailleur indépendant car, s’il est toujours subordonné à l’employeur, il devient est astreint à un résultat, c'est-à-dire à réaliser des objectifs. D’ailleurs de nombreux salariés non –télétravailleurs sont déjà soumis, de bon ou de mauvais gré, à la gestion par objectif. C’est loin de plaire à tous, car la gestion par objectifs repose souvent sur des indicateurs chiffrés très discutables !

Que se passera-t-il si le salarié la refuse la dictature des indicateurs chiffrés ?
Mais tous les salariés occupant des emplois « télétravaillables » seront-ils obligés d’accepter de ne plus travailler « au temps » (calculé par an et non par jour ou par semaine) mais par « objectif ». Seront-ils obligés d’avoir une âme de travailleur indépendant ? Ne risquent-ils pas d’être exclus alors que la gestion « au temps » est à la base du droit du travail français ?

Il y a évidemment d’autres risques d’exclusion si l’on accélère sans précaution la développement du télétravail (capacité d’autonomie, rapport de confiance à l’entreprise …) sur lesquels nous reviendrons.

D’accord ou pas d’accord avec notre analyse, si vous ne l’avez pas encore fait, participez largement à notre enquête en ligne sur le télétravail (http://teletravail.enquete.free.fr).
Invitez, SVP, les autres télétravailleuses et télétravailleurs à y participer aussi.

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